La consommation de cannabis s’avère parfois dangereuse pour les personnes à risque de psychose

Il existe de solides preuves établissant un lien entre la consommation de cannabis chez les adolescents (en particulier chez les jeunes de moins de 16 ans) et l’aggravation des symptômes de psychose. Pour certains jeunes, une première visite aux urgences pour une psychose provoquée par la consommation de cannabis peut conduire à la schizophrénie dans les trois ans qui suivent.
Chez les personnes atteintes de schizophrénie comme chez celles qui consomment fréquemment du cannabis, on observe une réduction de la densité synaptique du cerveau, c’est-à-dire de sa connectivité. Si un jeune est déjà exposé à un risque de psychose – par exemple, s’il présente des symptômes de psychose précoces tels que l’irritabilité, la méfiance, une humeur maussade et d’autres changements sur le plan de son comportement et de sa perception des choses qui l’entourent – la consommation de cannabis vient exacerber le problème déjà existant.
« Nous voulions comprendre l’incidence de la consommation de cannabis sur ces connexions cérébrales. Nous avons montré que les patients aux prises avec une psychose précoce et ceux à risque présentaient une densité synaptique plus faible. La densité synaptique était également plus faible chez les personnes qui consomment du cannabis », explique la Dre Romina Mizrahi, auteure en chef de l’étude, qui examine depuis vingt ans l’incidence de la consommation de cannabis sur le cerveau.
La Dre Mizrahi recrute des jeunes, pour la plupart au début de la vingtaine, qui se sont présentés à l’Institut universitaire en santé mentale Douglas, à Montréal, avec des symptômes de psychose précoce, comme le fait de commencer à entendre des voix, à voir des choses qui ne sont pas réelles ou à croire que quelqu’un les observe. Nombre de ces personnes se rendent aux urgences lorsqu’ils éprouvent de tels symptômes pour la première fois.
Ce sont les personnes qui ont commencé à consommer du cannabis avant l’âge de 16 ans qui courent le plus grand risque, et cette réalité touche plus particulièrement les jeunes hommes : une étude analogue menée par le Dr Daniel Myran a révélé que 40 % des hommes âgés de 16 à 24 ans avaient reçu un diagnostic de schizophrénie à la suite d’une visite aux urgences pour une psychose provoquée par la consommation de cannabis.
Tous genres confondus, l’étude du Dr Myran a montré que 26 % des personnes s’étant présentées aux urgences pour une psychose provoquée par la consommation de cannabis ont reçu un diagnostic de schizophrénie dans les trois ans qui ont suivi.
« Il est important que les jeunes soient au courant des risques », souligne la Dre Mizrahi.
Une densité synaptique plus faible est associée à des symptômes néfastes comme le retrait social, un manque de motivation et une humeur maussade. Or, une intervention précoce peut changer la donne, voire améliorer la connectivité du cerveau.
« Ce qui est très intéressant, c’est que toute intervention psychosociale qui accroît les interactions sociales et la motivation peut également augmenter la densité synaptique », mentionne la Dre Mizrahi. « Cela ouvre la voie à des interventions psychosociales visant à augmenter la densité synaptique, parallèlement aux médicaments. »
Cette étude novatrice est la première à mettre l’accent sur les personnes présentant des symptômes de psychose précoce plutôt que sur les patients ayant déjà connu un épisode psychotique. Ainsi, elle permet d’envisager des interventions précoces qui pourraient influer grandement sur les jeunes à risque de psychose, voire contribuer à prévenir les symptômes.
En bref
L'enjeu
La consommation de cannabis et la psychose réduisent toutes deux la densité synaptique du cerveau, ou sa connectivité, ce qui peut entraîner des symptômes néfastes tels que le retrait social et un manque de motivation, en plus d’aggraver les symptômes de la psychose.
La recherche
La Dre Mizrahi et l’équipe de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas ont observé une réduction des connexions synaptiques très tôt en cas de psychose précoce ou émergente, de même qu’en cas de consommation de cannabis. Leurs recherches ont également montré que la réduction des connexions cérébrales chez les jeunes est associée à une diminution des interactions sociales et de la motivation.
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